Au Cameroun, le phénomène des femmes victimes de violences conjugales gagne du terrain

Au Cameroun, le phénomène des femmes victimes de violences conjugales gagne du terrain

Publié le 13 juillet 2020, par Charly ngon

D’après une enquête menée au Cameroun au niveau des différentes régions, les violences conjugales sur les femmes connaissent une véritable augmentation. 

Au Cameroun, les cas de violences conjugales enregistrés sur les femmes connaissent une évolution inquiétante. La récurrence de ces actes interpelle les uns et les autres à se pencher sur ce phénomène qui est en train de gagner la société. Les nombreux témoignages des victimes de ces violences, et les images souvent insoutenables des femmes qui sont battues au quotidien jusqu’à la mort parfois, mutilées, abandonnées ou encore traumatisées par ce qu’elles ont vécu, font la plupart du temps la une de l’actualité. Une triste réalité qu’on ne peut plus nier. Cette passiveté des autorités face aux violences conjugales accentue non seulement le débat autour de la question, mais aussi, prouve son incapacité à y faire face. Malgré les dispositions juridiques qui existent, les femmes continuent toujours à payer le prix fort de la barbarie des hommes.

Le Centre et le Littoral en tête sur les violences conjugales

Chaque année, le débat sur les violences conjugales au Cameroun est remis sur la table des discussions. Les thèmes changent, mais le problème reste toujours le même. Et sont souvent invités à ses assises, les représentants des organisations internationales de défense des droits des femmes, les associations qui militent contre les violences faites aux femmes, les victimes et les autorités. Seulement, les résolutions souvent adoptées au cours de ces rencontres, ne sont jamais implémentées sur le terrain ; au contraire, la situation va plutôt de mal en pire. De quoi s’interroger sur la capacité à apporter des solutions concrètes à ce phénomène. Mais ce qui est certains, tant que les dénonciations ne sont pas accompagnées des mesures punitives, les hommes qui ont pris l’habitude de maltraiter les femmes vont se sentir moins en danger et libres de faire ce qu’ils veulent.

D’après une enquête réalisée au Cameroun par l’Institut National de la Statistique ( INS) relative à la problématique des violences conjugales, région après  région, voici le classement qui a été fait. Selon cette enquête, le Centre arrive en première position avec 64%, mais la ville de Yaoundé seule enregistre 44%, puis suit l’Ouest 55%, Est 53%, Sud 52%, Nord-Ouest 48%, le Littoral enregistré pour sa part 47% de cas, et la ville de douala tout comme celle de Yaoundé à 44%, Nord 44%, Sud-Ouest 41%, Extrême-Nord 27%, et l’Adamaoua vient avec 26%. Des données hallucinantes qui rendent compte de la persistance des violences conjugales sur les femmes au Cameroun.  

« On est pas encore allé dans la reconnaissance de la violence conjugale comme un crime »

Les violences conjugales sont un faisceau de violences dans lequel on retrouve : les violences verbales, émotionnelles, financières, sexuelles et physiques pour ne citer que celles-là. La plus répandue dans notre société, c’est la violence physique. Selon certains observateurs, elle fait même partie de l’une des causes de mortalités chez la femme, et la banalisation qu’on en fait de cet acte jusqu’ici, fait en sorte qu’on ne prenne pas cela au sérieux. Et les bourreaux s’en sortent toujours. Pour la militante des droits des femmes Minou Chris-Tayl, plusieurs raisons justifient cela : « On arrive pas à condamner les hommes qui battent sur leurs femmes parce qu’on est dans une société ou dans un contexte où la violence conjugale est encore prise pour une affaire privée. On est pas encore allé dans la reconnaissance de la violence conjugale comme un crime. On arrive pas aussi à les condamner parce que la société tolère, on remet encore la faute sur la femme. On refuse de prendre l’ampleur des violences, ce n’est pas encore une grande cause chez nous. Les personnes chez qui les femmes vont se plaindre, sont aussi celles qui violentent la plupart du temps leurs compagnes, leurs petites amies, ce qui fait en sorte qu’il n’y ait pas une sensibilisation massive sur le problème». 

Violence conjugale, une épine difficile à retirer

Dans certaines familles, on apprend très vite aux jeunes filles que, le fait d’être battu par son homme est une preuve d’amour. Une femme ne doit jamais quitter son foyer juste parce que son mari a battu sur elle. Au contraire, elle doit lui être obéissant et respectueux parce que l’homme est le chef de famille. Une culture très répandue dans la société camerounaise qui rend le combat sur les violences conjugales difficiles à y mettre un terme. Lorsqu’un cas de violence conjugale est signalé, les différents membres de la famille s’arrange le plus souvent à ce que l’affaire ne fasse pas grand bruit. Tout le monde s’oppose à ce que la victime porte plainte ou encore quitte le foyer.

Les arguments qui lui sont le plus souvent avancés, n’ont pour seul objectif qu’elle se sente coupable de la décision qu’elle veut prendre. Le plus souvent on lui tient les les propos du genre : il faut supporter c’est comme ça le mariage, il faut penser aux enfants, il va changer, la liste est longue. La plupart du temps, ce type de propos on les entend dans la bouche des personnes qui ont, été aussi les victimes des violences conjugales. Sur la base de leurs expériences personnelles, elles construisent un paradigme du silence, pour que les autres victimes de violences conjugales en fassent autant pour éviter tout scandale dans la famille. Et c’est ainsi que plusieurs femmes vivent malgré elles dans les relations toxiques. La peur du regard de la société fait en sorte qu’elles sont incapables de dénoncer les mauvais traitements qu’elles subissent de la part de leurs maris. Du coup, elles sont contraintes de soigner les apparences juste pour faire bonne mine en public.

L’une des choses qui attire aussi l’attention lorsqu’un couple se donne spectacle, c’est la réaction du public. Il est très révélateur du regard que la société porte sur les femmes qui sont victimes de violences conjugales. La plupart du temps, les personnes ( hommes et femmes) présentes, observent juste ce qui se passe, mais ne lèvent pas le petit doigt pour mettre un terme à la dispute. Pour se justifier, elles avancent l’argument selon lequel entre l’écorce et l’arbre il ne faut jamais mettre le doigt. Pour d’autres c’est une querelle des amoureux comme il n’en existe toujours. Du coup, aux yeux de tout le monde, on envoie le message selon lequel, la violence conjugale est quelque chose de normale au sein d’un couple. En ce moment, il devient difficile pour certaines personnes de dénoncer avec toute la dernière énergie la souffrance que ces femmes traversent. D’où l’urgence de faire de la question des violences conjugales, une priorité au sein de la société camerounaise. Ceci passe par les grandes campagnes de vulgarisation, de l’éducation au niveau du tissu familial, et la mise en place d’une loi spéciale qui protège les personnes victimes de violences conjugales.

 

Auteur : Charly ngon

Molah ne te fie pas à mon name, je ne suis pas un mbenguiste, je suis du bled comme toi. Les hauts et les bas sont notre quotidien, donc ne fia pas c'est entre nous quoi ... comme au letch