Traditions & Légendes : Les origines de la danse Bikutsi au Cameroun

Traditions & Légendes : Les origines de la danse Bikutsi au Cameroun

Publié le 19 septembre 2017, par Charly ngon

Le Bikutsi est une danse traditionnelle pratiquée dans les sociétés  Fang- Beti qui vivent principalement dans les régions du centre et du sud du Cameroun. En langue Ewondo, il se prononce « Bia kut si », qui veut dire « nous frappons le sol ». Il se danse généralement  en bougeant les membres supérieurs et inférieurs du corps, en suivant le son que donne une harpe double face, avec une amplification   »calebassée » appelée le Mvett, qui lui donne un rythme saccadé, très dansant.

 

Cette danse tire son origine des femmes. Il se raconte que, le peuple Beti comme les autres peuples Bantou, est une société patriarcale, où seuls les hommes ont droit à la parole. Les femmes « Béti Be Nanga », quant à elles, sont interdites de prendre la parole en public devant les hommes. Plus encore de se chamailler avec qui que ce soit. Bref pas moyen d’exprimer leurs avis. Une situation inconcevable à  leur goût. Alors pour réussir à contourner cet interdit, chaque fois qu’elles rentrent du marché, après la vente de leurs produits, elles se retrouvent avec d’autres femmes au cours du chemin, dans une sorte de rassemblement festif. Elles se mettent ensemble en formant un cercle, dans lequel chacune d’elles vient exprimer sa joie, sa peine, sa frustration  en frappant les mains, parfois les petites lamelles de bois en leur possession tout en chantant , sous les acclamations des autres femmes qui reprennent en chœur le refrain, en tapant les pieds au sol.

Pour les hommes qui assistaient souvent à  cette mise en scène, ils voyaient cela comme un simple rassemblement spontané des femmes qui voulaient exprimer leur joie. Selon certaines femmes qui ont vécu ces moments, ces chants pour la plupart s’adressaient à leurs maris qui passaient le temps à ne rien faire, ou encore pour parler de leur infidélité. On la considérait même comme une thérapie, parce qu’il permettait aux femmes de se décharger de toute leur tristesse. Il se pourrait même que, ces femmes se retrouvaient à l’avance pour préparer les chants et les pas de danse, ceci à l’insu des hommes. Précisons que toute réunion entre les femmes était interdite également, sous risque d’être taxées de conspiratrices, et l’histoire nous apprend que, toute femme ainsi considérée se rendait coupable de la mort de son mari et par conséquent, sa punition était d’être enterrée vivante avec ce dernier.

Mais ce Bikutsi là , a connu une évolution et une révolution, tant dans les textes que dans les accords. Les hommes qui ont fini par se réapproprier cette danse, on fait du Bikutsi non plus une danse a part entière, mais un rythme très dansant en y ajoutant d’autres éléments tels que la guitare solo et basse pour lui donner plus de percussion. Parmi les précurseurs de ce rythme qui est devenu mondialement reconnu au fil du temps on a : Messi Martin, Ange Ebogo. Mais c’est avec le groupe des Têtes Brûlées, que le Bikutsi a écrit sa plus belle histoire dans la musique camerounaise. Avec son maître à jouer Zanzibar, qui a lui seul était capable de vous faire pénétrer le beat jusqu’aux os, tout en réveillant en vous des pulsions incontrôlables. Nombreux  sont ceux qui s’en souviennent encore de ce virtuose de la guitare que la mort a très vite arraché à la vie.

©. Capture d’Ecran Youtube. Les Têtes Brûlées

Aujourd’hui, ce rythme bien qu’il soit noyé dans une sorte de métissage culturel, ceci à la faveur de l’imagination des artistes, garde encore tout moins sa sonorité originale, qui se reconnaît facilement à la première mélodie.  A côté de la musique, il y a aussi une panoplie de littératures consacrées à  l’histoire du Bikutsi . Même si parfois, lorsqu’on essaye d’évoquer cette histoire, nombreux sont ceux qui pensent instinctivement au groupe Les Têtes Brûlées. Mais au-delà du caractère festif, cette danse est un patrimoine des peuples Fang-Beti.

Alors, chers letchois, quel regard portez-vous sur le Bikutsi d’aujourd’hui ?

Auteur : Charly ngon

Molah ne te fie pas à mon name, je ne suis pas un mbenguiste, je suis du bled comme toi. Les hauts et les bas sont notre quotidien, donc ne fia pas c'est entre nous quoi ... comme au letch