La vie n'est pas facile, son enfant a quatre pères - Auletch

La vie n’est pas facile, son enfant a quatre pères

Publié le 18 mars 2015, par dartnaud

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On a souvent l’habitude de vous dire ici que les choses de Mbeng* sont compliquées mais beaucoup ne le croit pas. La qualité d’histoire que chacun vit de son coté là, c’est lui seul qui comprend sa tête sur ça. Ce n’est pas facile, même un peu ; tu ne t’en rends pas compte mais tu constates seulement la situation quand elle est déjà là. Il n y a qu’en Mbeng qu’on trouve des enfants avec même cinq pères différents. Cela semble utopique nessa* ? Je vous explique.

Voilà une nga* qui vit au Mboa* tranquille. Elle n’a pas fait de longues études, mais elle a son petit commerce au quartier qui l’aide à subvenir à ses besoins et à aider sa famille quand elle peut. Ça marche plutôt bien pour elle, car c’est une battante. Elle envisage de voyager pour l’Europe, elle veut devenir mbenguiste comme beaucoup. Pour ce projet, elle met de l’argent de côté depuis longtemps en attendant d’avoir un tuyau. Elle a aussi des amis en France qui la soutiennent pour ce projet. Après des mois de préparation, elle réussit enfin à traverser. La voici donc à Pago*. Malheureusement, tout ne s’est pas déroulé comme elle le prévoyait car elle est enceinte … C’est là que l’histoire des pères commence !

Premier père : le Géniteur. Au pays, elle sortait avec un djo* et ils s’entendaient bien. Le hic, c’est qu’il était marié. Elle ne pouvait donc pas se projeter dans l’avenir avec lui. Mais sans le vouloir, elle est tombée enceinte, de surcroît juste avant son voyage pour Mbeng. Elle est contre l’avortement et le père ne veut pas s’en occuper prétextant qu’il est marié. Voilà le premier ndem*.

Deuxième père : l’officiel. Après quelques temps à Pago, elle se retrouve dans une mauvaise situation : plus de kaolo*, sans travail et mère d’un enfant. Sur le conseil de ses amies, elle commence à chercher un djo french* comme ça il pourra reconnaître son muna*. Vous-même vous savez comment ça se passe, elle tchoko et l’enfant est reconnu ; il devient french. Sur son acte de naissance il porte comme nom du père celui du djo qui l’a reconnu. Voilà le deuxième ndem.

Troisième père : Le concubin. Maintenant comme son enfant est french, elle a les papiers aussi – mais pas la nat’ hein. Entre temps, il y a un Italien là qu’elle a rencontré à une fête et depuis ils se fréquentent – elle aussi veut goutter au chocolat blanc noon, vous pensez que quoi ? – Quelques temps après s’être mis ensemble, la voilà enceinte du gars. Seul bémol, son bel Italien ne veut pas s’engager sur le long terme car sa famille n’est pas d’accord, ils ne veulent pas de fille noire. La relation finit par capoter et elle se retrouve seule avec deux enfants et trois pères. C’est le troisème ndem.

Quatrième père : l’époux. Fatiguée des échecs sentimentaux avec les Whites, elle décide de se remettre avec un gars d’origine kamer. Ça tombe bien, il y a un monsieur qui la courtise depuis peu et est prêt à l’accepter avec ses deux enfants, lui aussi en a déjà deux. Elle le trouve plutôt bien et responsable, le courant passe à merveille, il a une bonne situation ; toutes les conditions sont réunies pour le parfait amour. La voilà de nouveau dans une relation qui aboutira cette fois au mariage.

Pour récapituler un peu :

  • Son premier enfant est noir, a la nationalité french, et a quatre pères différents dans sa vie.
  • Son deuxième enfant est métis, a la nationalité italienne, et a deux pères différents dans sa vie.
  • Elle-même la mère à la nationalité Kamer, un titre de séjour french, deux enfants (un noir et un métis), puis les deux autres enfants de son nouveau conjoint.
  • Les quatre pères défileront chez elle toute sa vie.
  • Les quatre enfants auront deux mères.

Avec tout ça, vous confirmez avec moi que la vie n’est pas facile, surtout en Mbeng. Voilà alors comment un enfant peut avoir facilement quatre pères et deux mères différentes sans lui-même savoir par quelle magie c’est arrivé.

L’une des conséquences de tout ça est qu’au final l’enfant est embrouillé, il ne sait plus qui est qui et cela peut entraîner un déséquilibre. Ils vont poser des questions auxquelles il faudra répondre. Il ira même jusqu’à se demander si sa mère l’aime vraiment ou s’il n’est pas juste une source de kaolo à ses yeux.

Tout ça est compliqué n’est ce pas ? En tout cas, les enfants qui ont été reconnus là, sachez que vous faites parti du patrimoine de votre père officiel. Donc s’il meurt là, ça sera une occasion de récupérer ce que votre mère a investi pour votre nat’ ie. l’héritage. D’autre part, pardon mes soeurs, pensons à ces enfants qui n’ont rien demandé et à leur avenir qu’on compromet juste pour les kaolos.

Lexique     
Know : connaitre              ;    Mbeng : Europe, Usa
Muna : Enfant                 ;    Kaolo: papiers
wanda : etonner              ;    ask : demander
mboa : bled                   ;    Do : argent
Nessa : N’est ce pas       ;    Nga  :  Fille
Djo : Gars                    ;    Kako  :  Affaire
Lep : Laisser                ;     Pago : France
Ndem : Malchance          ;    French: Français
Kamer : Camerounais     ;    White : Blanc

Auteur : dartnaud

L'Afrique mon essence, le Cameroun ma muse ... J'aime la tchop (le kouakoukou et le riz), les mots(la poésie), la musique (Bikutsi, Hip-Hop). Blagueur et toujours en mode sourire. Si tu veux me "vexe", touche mes dos !