Interview : Franck DAKAYI C.E.O Ease Travel Services : « L’entrepreneuriat c’est de longues heures de travail, c’est des échecs. »

Interview : Franck Dakayi C.E.O Ease Travel Services : « L’entrepreneuriat c’est de longues heures de travail, c’est des échecs. »

Publié le 12 mai 2018, par Dickson

On a rencontré Franck Dakayi, promoteur de Ease Travel Services, une agence de voyage digitale.

  • Bonjour, vous êtes connus pour être à la tête de cette initiative ! Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur vous ? D’où venez-vous ? Quel a été votre parcours ?

Je suis Franck DAKAYI, camerounais, né à Douala, il y’a un peu plus de 33 ans. J’ai fait mon cursus primaire et secondaire entre Douala et Bangui au gré des affectations de mon père. Après mon Bacc, je me suis rendu en Allemagne pour mes études en génie électrique. Après mes études, j’ai travaillé 3 ans dans une entreprise de IT Consulting. Depuis 2015, je suis de retour au Cameroun. J’ai créé et dirigé deux PME, une qui fabrique des chips de plantain « Festicroch » et Ease Travel Services (prononcé iZ) , l’agence de voyage digitale.

  • Quand avez-vous décidé de vous lancer dans cette aventure ? Quel a été le déclic ?

Déjà, j’ai toujours voulu être entrepreneur. Ma première entreprise remonte à mes 9ans, je faisais du « Top-maïs » (farine de maïs avec du sucre), que je vendais à mes camarades de classe. Je ne le faisais pas parce que j’avais besoin d’argent pour payer ma scolarité ou autre, mais parce que l’idée d’être capable de créer de la richesse, multiplier mon argent de poche me passionnait.

Le déclic est tout simplement un constat fait au fil des années, au fil des voyages. Voir des voyageurs qui arrivent à l’aéroport à 4h du matin et qui doivent attendre le lever du jour pour trouver une voiture parce que peur des agressions, ou ceux qui ont beaucoup de bagages et ne trouvent pas de voiture adapté, ceux qui viennent à l’aéroport à 22h pour un vol qui aura lieu à 5h du matin, parce que c’est compliqué ou parfois dangereux de sortir la nuit pour se rendre à l’aéroport…Ce problème identifié, j’en parle à mes co-fondateurs Stéphane KAMGA et Yves NKODO et ensemble nous décidons de créer EASE TRAVEL SERVICES pour proposer une solution à ces problèmes, nous sommes alors en septembre 2015.

  • Parlez-nous de votre service en détails et dites nous comment ça fonctionne ?

Aujourd’hui nous proposons 4 services.

Les billets d’avion. Vous n’avez plus besoin de vous déplacer pour avoir une information sur un vol, le programme, les tarifs, une réservation et même pour l’achat de votre billet

Le transfert d’aéroport/gare. Un bus à prendre à 4h du matin ? Un vol qui arrive à Nsimalen à 23h? Vous pouvez réserver à l’avance votre transport. Ce service est disponible à Douala, Yaoundé et Paris.

La location de voiture avec chauffeur à l’heure pour les déplacements dans la ville, à partir de 4000F/Heure

La location de voiture journalière. Vous avez la possibilité dans l’application et bientôt sur notre site internet de consulter un peu plus d’une centaine de voiture et choisir la voiture qui vous convient. Tous ces services sont disponibles à travers l’application mobile, whatsapp, email ou appels.

  • Pourquoi selon vous utiliser votre service est un plus pour le Cameroun en particulier et le monde en général ?

Comme c’est indiqué dans le nom de notre entreprise (EASE), nos produits ont pour objectif premier de rendre les choses faciles pour le voyageur. De manière générale, ce que nous apportons c’est la disponibilité de l’information, la facilite de réservation, des prix accessibles et la qualité de service. Nous ne créons rien qui n’existe déjà, nous les rendons facile d’accès, nous nous assurons que la qualité de service soit au rendez vous et que le client paye le prix juste, et non un qui varie au faciès. En ce qui concerne les billets d’avion par exemple, les agences de voyage traditionnelles sont ouvertes de 8h à 18h, et 12h le samedi. Chez EASE nous sommes à votre disposition 7/7. Ceci reste valable pour nos autres services, organiser un transfert d’aéroport ou ses déplacements dans la ville se fait en quelques clics. La recherche d’une voiture de location pour un week-end à Kribi ou une mission à Yaoundé s’organise tout aussi facilement.

  • Quels sont les défis que  vous rencontrez dans votre parcours ?

Quand nous créons EASE en 2015, nous ne voulons pas être une agence de voyage digitale. L’objectif est de créer des solutions pour les agences de voyage, qui elles, vendraient les différents produits (transfert d’aéroport, location horaire et journalière de voiture…) à leurs clients en plus des billets d’avion qu’elles vendaient déjà.
Nous leur apportions des services de plus à proposer à leurs clients, de nouvelles sources de revenus, sans investissements à réaliser.
Quand nous avons commencé la prospection des agences de voyage, on pensait être accueillis en musique avec des pétales de rose. La douche a été froide. Les vieilles habitudes ont la peau dure. Quand vous apportez une nouvelle manière de faire les choses, vous devez fournir un plus grand effort pour éduquer, faire changer les habitudes, qu’il s’agisse du voyageur qui a l’habitude de chercher son transport une fois sortie de son vol et chargé de bagages ou du patron d’agence de voyage qui ne veut pas se casser la tête et veux se contenter de vendre ses billets d’avion comme il le fait depuis 20 ans et rien d’autres…
Aujourd’hui nous passons d’un modèle purement Business to Business à un modèle Business to Consumer. Nous n’avons toutefois pas abandonné l’idée de fournir nos solutions aux agences de voyages.

Les  autres difficultés que nous rencontrons, sont je pense, celles que tout jeune entrepreneur rencontre, faire savoir que son produit existe, convaincre les partenaires réticents à faire confiance à la jeunesse et accès aux financements.

  • Selon vous, quels sont les pré requis pour être entrepreneur dans le contexte socio-économique camerounais ?

Le premier mot qui me vient à l’esprit, c’est patience. Il faut être patient, mais pas résigné. Il faut toujours chercher à être une meilleure version de soi-même, être discipliné, bien s’entourer. L’entrepreneuriat c’est de longues heures de travail, c’est des échecs. C’est des doutes, il faut s’y préparer. Kiro’o le résume très bien dans son document « la méthode Rebuntu ». Je vais les paraphraser en disant, « l’entrepreneuriat ce n’est pas une ligne droite, ce n’est même pas une ligne ». J’ai l’habitude de dire si vous réussissez honnêtement dans les affaires au Cameroun vous pouvez conquérir le monde.

  • Une anecdote marquante de votre parcours d’entrepreneur

Quand vous êtes entrepreneur au Cameroun, vous en avez pratiquement une chaque semaine. Je pourrais parler de cette patronne d’agence de voyage qui était trop polie pour me dire non, mais pendant un mois me disait à chaque fois que je demandais des nouvelles, « mon avocat n’a pas fini de lire votre contrat ». C’était un contrat de 6 pages…, de ce rendez-vous avec des responsables d’une compagnie aérienne camerounaise il y’a quelques années. Juste avoir réussi à avoir ce rendez était un succès…pour vous dire.
Nous leur présentions notre 1ère application mobile, MyAirport et la possibilité de travailler ensemble pour fournir gratuitement à leur client en temps réel les programmes de vols et une alerte en cas de retard et changement dans le planning.
Ensuite, nous leur présentions l’application web Ease Travel Services qui pourrait être utilisée dans leurs agences pour permettre aux clients lors de l’achat du billet d’avion de réserver directement son transport vers ou de l’aéroport, à l’image de ce que font déjà d’autres compagnies aériennes africaines et européennes.
À la fin de la présentation, la 1ère et seule question était : « C’est vraiment très intéressant tout ça M. Dakayi, mais vous le faites déjà avec quelle autre compagnie aérienne ? ».Vous montrez la lune et on vous pose seulement des questions sur la taille de votre doigt. Je pense que je n’ai pas besoin de vous dire quel a été le résultat de ce rendez vous.

  • Où est-ce que vous vous voyez dans 5 ans ?

Dans 5 ans j’espère être à Douala, en bonne santé dans un pays en paix et prospère. J’espère diriger une entreprise qui aura étendue ses ailes dans plusieurs pays d’Afrique.

Aujourd’hui, nous proposons des services de location de voiture et billets d’avion, et à court terme l’objectif est d’intégrer aussi sur notre plateforme la réservation d’hôtel, les appartements meublés, l’achat de tickets de bus interurbains et à moyen terme étendre ces différents services à toutes les grandes villes d’Afrique central et de l’ouest.

  • Si on devait mettre en lumière une autre start-up ou initiative camerounaise actuellement, selon vous ce serait laquelle ? Pourquoi ?

Je parlerais de l’initiative Kiroo Rebuntu qui décide de partager son expérience, le parcours, les échecs, réussites, piège à éviter. Ceux qui échouent parlent très peu de l’échec et ses causes, ceux qui réussissent parlent encore moins de la manière dont ils y sont arrivés. C’est à encourager. Le document « La Méthode Rebuntu » qu’ils mettent à disposition des startuppers est de grande qualité.

  • Un mot pour la fin … un message à l’endroit de la jeunesse camerounaise !

Chaque semaine la jeunesse camerounaise produit une nouvelle idée, initiative, start-up. Il faut qu’elle continue d’oser, de rêver le Cameroun qu’elle voudrait. Il faut aussi qu’elle s’intéresse à la politique pour choisir elle même ses dirigeants et le premier pas c’est de s’inscrire sur les listes électorales. Je voudrais aussi remercier votre plateforme pour la visibilité qu’elle donne aux start-ups et aux jeunes entrepreneurs.

Auteur : Dickson

Je fais partie de la Génération Androïde donc jamais sans mon phone. All les days, je jongle entre les fonctions de mélomane, d'internaute et de noctambule. En résumé, je suis un camerounais déjà avancé !