Entretien avec Elisa alias DcoGraphik - Auletch

Entretien avec Elisa alias DcoGraphik

Publié le 25 novembre 2013, par dartnaud

Auletch.com est allé cette fois à la rencontre d’une jeune camerounaise de talent : Elisa alias DcoGraphik. Comme son nom l’indique, c’est une décoratrice doublée d’une graphiste. Aujourd’hui elle nous parle de son univers, ses influences, son positionnement par rapport au Cameroun et plein d’autres choses.

 

Bonjour Elisa, est-ce que vous pouvez présenter DcoGraphik au public d’auletch.com pour ceux qui ne vous connaissent pas encore?

Bonjour à tout le village, ceux qui me connaissent et ceux qui vont me découvrir (en ville aussi hein). DcoGraphik est un nom déposé. Il est né il y a deux ans en tant que pôle Communication de la sarl VBConcepts (entreprise de service). Il met sa créativité au service des professionnels et des particuliers pour les besoins de leur communication visuelle et marketing. DcoGraphik, c’est aussi un média online à l’univers hybride, focus sur la mode, l’événementiel, le design. C’est un « espace d’accolement permanent » à l’identité frontalière entre l’Afrique et les autres continents. On s’y balade d’un lieu à l’autre, d’une sensibilité à l’autre, d’une vision du monde à l’autre. Il s’adresse principalement aux Afropolitains comme on les appelle communément.

 

Parlez-nous de vos débuts, comment est-ce que cette passion est née ?

Je suis née avec ! Lol.  Ma passion des arts, mon attirance particulière pour le spectacle scénique et le graphisme se sont affirmées au fur et à mesure de mes études et mes formations. La création de DcoGraphik est née avant tout, de mon envie de partager ma passion artistique et d’échanger sur celle des autres.

Je me suis lancée dans cette aventure, après la décision de partenariat avec la SARL VBConcepts et l’obtention de mon diplôme de Décoration d’intérieur-étalagiste.

Êtes-vous une autodidacte ou bien vous êtes passées par une formation ?

Je crois sincèrement être née avec cette passion. Mais comme tout don qui nous est donné, il faut savoir l’entretenir, le cultiver et le partager. C’est pourquoi après mon bac littéraire en arts plastique, j’ai fait une formation de web designer. Comme le design m’attirait plus que le langage html, mysql… je ne me suis consacrée qu’à l’infographie. Quelques années plus tard, étant Visual Merchandiser retail, j’ai voulu approfondir mes techniques marketings. J’ai été formée et j’ai obtenu mon diplôme de décoratrice d’intérieur, de l’école MJM Graphique Design de Paris.

 

Comment avez-vous choisi le nom DcoGraphik, qu’est-ce qui vous a inspiré ?

Le nom DcoGraphik m’est venu tout naturellement du fait que je sois décoratrice-infographiste. Mais étrangement, je vous avoue que de plus en plus, ce nom sonne « Afrique » à chaque fois que je le prononce.

 

Quand on sait que les graphistes mettent un point d’honneur à donner un sens à leurs créations, parlez-nous de la conception de votre logo Dcographik

Pour tout vous dire, le processus de création de notre logo a été long et s’est finalisé un an après la création même du nom DcoGraphik. Mon premier jet, ne nous aidait pas à développer notre «branding»; il n’était graphiquement pas assez professionnel.

Le logo actuel doit vous faire ressentir le métissage culturel à travers l’agencement des couleurs et du noir. La passion est suscitée à travers les typographies qui s’entremêlent. La typographie du D est décorative, telle une mosaïque en termes de touches de couleurs. La typographie du G et du K est graphique, on joue plus sur le corps de la lettrine : rond, gros, droit, fin. C’est une fonte calme qui inspire la confiance. Elle traduit aussi le raffinement, le sérieux, inspirés de la joaillerie de luxe.

Sur le plan de sa lecture, DcoGraphik se lit du bas vers le haut, ce qui lui confère un certain dynamisme ; et le choix des initiales « DGK », lui donne de l’équilibre.

Après un sondage auprès de nos « likers », on est enfin persuadé que notre logo saura traverser le temps tout en restant d’actualité. DcoGraphik « DGK » est donc définitif et déposé à l’INPI.

Sur votre page Facebook, vous parlez beaucoup de mode, design, lyfestyle, musique, arts … Pensez-vous que ces univers sont indissociables ? Si oui comment vous organisez vous ? Si non, pourquoi en parlez-vous alors qu’on sait que votre univers c’est le graphisme et la décoration?

Bien sûr que non, ils sont dissociables. Il n’est malheureusement pas possible de parler de tous les arts sur DcoGraphik.

Quand j’ai créé DcoGraphik, j’ai constaté très rapidement un manque pour moi, dans certains domaines artistiques comme le Design. Beaucoup de sites, de blogs, de magazines riches en informations et visuels de qualité sont majoritairement anglo-saxons et ne traitent pas du design africain. Très peu encore aujourd’hui (excepté Afrikadaa) sont  francophones et traitent de ces sujets avec la qualité visuelle et un langage non pédant. Ceci est nécessaire pour toucher ceux qui parfois sont tentés de croire que tout ce qui concerne l’art appartient à une certaine élite ou/et est inutile. L’art doit être accessible à tous et chacun de nous est capable d’en pratiquer. Dans tous les univers que j’aborde sur DcoGraphik, l’infographie ou la décoration y sont intimement liés. Je me refuse à dissocier la décoration de l’infographie car ils font partie de moi aussi vrai que je suis une afro-occidentale.

Au fur et à mesure que je peaufine la page, je recentre mon intérêt vers trois axes principaux : la mode, l’événementiel et le design. J’organise donc la page à travers ces trois mondes au gré de mes envies.

Ma multi-appartenance et mon besoin de partager, échanger sur l’art et  l’événementiel me conduisent à persévérer dans ce sens.

Par quoi êtes-vous influencée dans vos créations ? Quels sont les univers qui vous captivent ?

Par tout ce qui m’entoure. Comme une éponge, j’absorbe et j’essaie de ressortir le meilleur de ce qui me touche. Mon métissage m’amène à voir de l’africanité dans certaines décorations, créations…européennes. De ce constat, je me dis « mais qu’est ce qui m’empêche de marier ces deux univers ? » Rien.

Mes métiers me tiennent en veille sur divers tendances, ambiances, mais mes coups de cœur vont à l’art noir (africain, caribéen, américain), sans tomber dans le cliché ethnique. Les ambiances que j’affectionne sont chic et cosy avec une touche de pop. Il me faut de l’art pétillant, qui interpelle…beau! Mais comme vous le savez la beauté est subjective.

Etant Camerounaise d’origine, quel est votre regard sur l’univers des graphistes et de la décoration au Cameroun ?

Sur le plan des graphistes, on sait tous la difficulté qu’ont nos artistes à promouvoir leurs œuvres. Je constate que la majorité des graphistes restent des graphistes au sens pur du terme, souvent autodidactes. Ils n’évoluent pas toujours vers l’infographie (PAO/DAO). Je ne sais pas si le festival 2013 de Mboa BD traitera du sujet, j’espère que oui. N’étant pas sur place et n’ayant pas de contact avec les gens du métier, je ne saurai pas dire si l’association Sweet Art’Frika traite ses BD via l’infographie ou reste dans du graphisme pur. Il faut savoir que l’infographie est un art jeune qui évolue à vitesse grand V, que les logiciels, les matériels informatiques adéquats ne sont pas accessibles pour toutes les bourses. Tout cela réuni, on peut donc aisément comprendre les difficultés pour ce métier à se faire une place dans la culture camerounaise bien qu’il y ait un grand potentiel créatif au Cameroun. La plupart sinon les 90% des infographistes ou graphistes camerounais que je côtoie sont sur les réseaux et vivent hors du Cameroun. J’aime particulièrement le travail de Henri Hang.

 Sur le plan de la décoration, je constate un engouement plus palpable. De belles réalisations s’opèrent dans l’événementiel et des lieux gastronomiques. Il suffit d’observer l’agencement du restaurant-galerie d’art Kajazoma, du restaurant-cabaret Yao Bà à Bastos ou la scénographie du défilé K-Walk : des perles !

Concernant le milieu des médias audiovisuels, personnellement c’est juste une catastrophe. J’en perds mes mots quand je regarde le décor des clips vidéo et celui des plateaux télé.

Au sujet de la décoration chez les particuliers, faire appel à une décoratrice d’intérieur ou une wedding planner n’est pas encore tout à fait rentré dans les mœurs camerounaises de ce que j’ai pu lire, entendre (et bien oui, je ne suis pas sur place et pour ce métier rien de mieux que de voir de ses propres yeux pour apprécier et donner un avis juste). Néanmoins, je pense que comme ici, il est question de bouche à oreille et si le talent est là, la magie s’opère. Les Camerounais en particulier et l’Afrique en général, méritent l’excellence et contrairement aux croyances, il ne faut pas rouler sur l’or pour s’offrir ce genre de prestation.

L’infographie/le graphisme et la décoration sont des métiers qui nécessitent une bonne formation, des bases solides. Ensuite rester en veille, avoir de la pratique en permanence est primordial. Et quand on est passionné(e)…

Nourrissez-vous des projets à terme sur le continent africain ? 

Oh que oui. Nous sommes encore très jeune alors avant le grand saut, l’objectif de DcoGraphik est de poser de bonnes bases ici en tant qu’agence à part entière. Par la suite, le projet est de faire le lien avec l’Afrique, en tant qu’agence de communication événementiel. Nous souhaitons travailler dans la décoration et dans le wedding planner avec notre concept AFroPolitan Wedding ; importer notre professionnalisme, notre sérieux et notre créativité à travers les standards de l’organisation d’un événement. Notre challenge est de donner une valeur ajoutée d’excellence à ce qui se fait déjà sur le continent africain. Nous cherchons donc des partenariats, des contacts sérieux avec qui nous pourrons travailler à l’avenir sur le Cameroun, le Togo, le Bénin et le Congo. Le marché très riche et créatif des pays anglophones africains est à l’étude.

Sur notre site on parle beaucoup de « mbenguetaire » comment vivez-vous ce statut qui veut que vous soyez complètement déconnecté des réalités du Cameroun, ce statut qui veut que vous ayez forcément une vie meilleure etc …

De nature très open minded, je n’y prête pas beaucoup d’attention à vrai dire. Je n’ai donc pas de malaise particulier à être ce que je suis : riche de mes deux cultures. Par contre lier systématiquement « mbenguetaire » à « avoir une vie meilleure, avoir réussi… », j’avoue n’avoir jamais compris ce mythe. Mais chaque personne a son raisonnement et sa conception des choses alors je respecte le fait que certains puissent se tromper.

Un mot pour la fin aux jeunes Camerounais qui comme vous souhaite se lancer dans une entreprise.

On est encore dans les starting block comme je vous le disais tantôt, alors je ne me sens pas assez expérimentée pour donner des conseils, mais s’il s’agit d’un mot pour encourager les jeunes Camerounais qui souhaitent se lancer dans l’entrepreneuriat, ce serait «ALLEZ-Y ! ». Je rajouterai qu’ils ne doivent pas douter de leurs capacités, de bien penser et murir leurs projets et enfin que l’audace, la passion, le professionnalisme et l’humilité ne les quittent jamais.

 DcoMaDoudou DcoMariage DcoRestaurant

Auteur : dartnaud

L'Afrique mon essence, le Cameroun ma muse ... J'aime la tchop (le kouakoukou et le riz), les mots(la poésie), la musique (Bikutsi, Hip-Hop). Blagueur et toujours en mode sourire. Si tu veux me "vexe", touche mes dos !