« Sōh Ndoo » : soirée de restitution de la résidence de création avec Keulion et Guy Kouekam

Bain de purification « Sōh Ndoo » : soirée de restitution de la résidence de création avec Keulion

Publié le 22 février 2021, par Charly ngon

Keulion a clôturé sa résidence de création par une soirée de restitution de l’exposition qui a duré deux jours à l’Institut Français de Douala.

Keulion

Placé sous le prisme du « Bain de purification » : « Sōh Ndoo » en Fèfè une langue parlée dans le Haut-Nkam, précisément à Bafang. L’Institut Français de Douala s’est transformé l’instant d’une résidence de création en un sanctuaire. Un lieu de pèlerinage où tout le monde converge pour se purifier, renaître de nouveau. Faire corps avec le réel et l’irréel, apprendre à se connaitre soi-même, se reconnecter avec son environnement. Trouver la solution à un problème ou encore, comme cela se dit plus familièrement « aller se laver au village ». Tel était l’objectif de Keulion qui était accompagné par Guy Kouekam, Lila, Adango, Dj Ibaaku et Fredy Manyongo qui ont proposé au public une séance de purification d’un autre genre, un voyage ancestral dans l’univers Banka à travers un vernissage qui a duré deux jours.

Keulion

Source: Institut Français de Douala

C’est à la salle polyvalente de l’Institut Français de Douala que le rite a eu lieu. La salle qui accueillait le cérémonial était déjà d’assaut par le public qui est venu assister à la soirée de restitution. L’entrée captivait avec les symboles qui étaient présents sur les murs et les baies vitrées. On reconnaissait immédiatement l’auteur de ces fresques : Keulion. Le plasticien forme aujourd’hui l’un des duo les plus performants en Afrique dans le domaine des arts visuels avec son binôme Guy Kouekam. À voir le travail qu’il a abattu en l’espace de quelques jours, on ne pouvait qu’être impressionné par son talent qui fait sensation à chaque fois. La transformation qu’il a apporté à l’institut était impressionnante avec un jeu de lumières qui allait du vert au bleu, du rouge au jaune suivant la mise en scène.

Keulion

 

Il y avait une fumée épaisse qui envahissait la salle, comme dans une ambiance de soirée brumeuse. De dehors on avait l’impression que les gens étaient noyés dans une sorte de fumée. Ce décor pensé à l’avance, permettait au public d’avoir la sentiment de participer à un rituel de purification. Perché sur un pupitre avec une vue sur toute la salle, coiffé d’un masqué assez particulier conçu par Tally Mbok nommé le future ancestral, Dj Ibaaku ExStaz qui a fait le déplacement depuis le Sénégal pour cette grande messe officiait en tant que grand prêtre. Derrière son ordinateur, il balançait une série de mixes, des rythmes traditionnels, du Hip Hop, de l’electro, du jazz avec une déclinaison afro futuriste.

Ibaaku

Source: Institut Français de Douala

Au milieu de toute cette atmosphère, le regard de l’assistance était rivé sur la prestation de la danseuse professionnelle Lila qui exécutait des mouvements assez complexes qui obligeaient son corps à se tordre comme un reptile. Les gestes étaient parfois intenses avec des moments de transes comme pour libérer son corps d’un mauvais esprit. Les incantations d’Adango donnaient encore à la prestation de la danseuse une certaine originalité dans l’acte de purification, car la plupart du temps certaines séances de purification se déroulent ainsi dans nos villages …

Lila, Keulion

De l’autre côté de la salle, le mannequin Fredy Manyongo était recouvert d’une couleur or sur tout le corps et d’un tissu noir sous l’apparence d’un génie. Chacun de ses gestes obéissaient à un rituel défini à l’avance. Grand de taille, imposant, sa prestation a suscité beaucoup d’interrogations. Malgré les mouvements qu’il y avait au tour de sa personne, il ne perdait pas le fil de la soirée.

Fredy Manyongo

À la fin de la mise en scène, le public a eu droit aux explications des deux plasticiens autour du concept « Sōh Ndoo ». Le public était impatient de vivre ce moment. Une fois de plus c’était un challenge que Keulion et Guy Kouekam devaient relever, parvenir à matérialiser une œuvre de l’esprit par quelque de chose de concret. L’idée est partie de la situation sanitaire actuelle, il fallait parler de la genèse, de l’évolution du virus et enfin remettre l’être humain au centre de tout. C’est ce que les deux artistes ont fait, et dans l’explication de Keulion, il ressort que leur approche du bain de purification, telle qu’elle a été présentée, était basée sur quatre éléments : le vent, le feu, la terre et l’eau. Et chaque élément cité était directement lié à la pandémie. Le « Bain de purification » comme thématique de leur vernissage apparaissait donc comme une lecture du monde depuis l’arrivée de virus. À cause du confinement les gens ont su apprécier le partage, les échanges, le tribalisme ou encore le racisme ont été remplacés par le vivre ensemble. La pharmacopée africaine ne s’est jamais aussi sentie bien valorisée. On ne compte plus le nombre de produits traditionnels mis sur le marché pour faire face au virus. Les gens sont tout simplement redevenus humains …

Keulion

Auteur : Charly ngon

Molah ne te fie pas à mon name, je ne suis pas un mbenguiste, je suis du bled comme toi. Les hauts et les bas sont notre quotidien, donc ne fia pas c'est entre nous quoi ... comme au letch