8 Mars : histoire, discrimination et égalité de chance pour la femme au Cameroun

8 Mars : histoire, discrimination et égalité de chance pour la femme au Cameroun

Publié le 7 mars 2018, par Charly ngon

Cette année on célèbre la 33ème édition de la journée internationale de la femme au Cameroun sous le thème : « Intensifier la lutte contre la discrimination à l’égard des femmes, renforcer le partenariat pour le développement ».

Image illustrative

Si les thématiques varient d’une année à une autre, les problèmes quant à eux restent très souvent sans issue concrète. Conscientes du long combat qu’elles doivent mener au jour le jour pour avoir leur droit de citer, les femmes profitent donc de cette journée pour poser exprimer leurs revendications généralement pas appliquées et les difficultés auxquelles elles font face. Même si d’un pays à un autre les réalités ne sont pas les mêmes, il n’en demeure pas moins que l’égalité homme et femme reste au centre des préoccupations de tout gouvernement. Laquelle peut trouver une voie de solution si et seulement si, les hommes cessent de considérer la femme comme un être faible, inférieur, qui n’a pas assez de rigueur pour prendre une décision importante. Plusieurs femmes ont marqué l’histoire au travers des actions et des luttes menées pour la revendication de leurs droits. Aujourd’hui, en mémoire de leurs sacrifices, des millions de femmes dans le monde célèbrent la journée internationale de la femme.

L’histoire de la journée internationale de la femme débute avec Clara Zetkin, une enseignante, journaliste et militante du parti socialiste allemand. Lors de la deuxième conférence internationale des femmes socialistes à Copenhague en 1910, elle a émis l’idée d’instaurer un jour pour célébrer les droits de la femme. La date n’étant pas encore arrêtée, il fallait mobiliser les femmes pendant un jour pour faire entendre leurs doléances, ceci  en accord avec les organisations politiques et syndicales du prolétariat dotées de la conscience de classe souligne l’historienne française Françoise Picq. En 1911 a lieu la première manifestation des femmes en Allemagne, en Suisse, en Autriche, au Danemark et enfin aux Etats-Unis.

Ce n’est qu’en 1912 que la France organisera à son tour son rassemblement dans le but de revendiquer le droit de vote, de travail et la fin des discriminations au travail. Jusque là on ne parle pas encore de 8 mars. Mais à partir de cet instant, l’Europe va connaitre de nombreux rassemblement de femmes non pas pour revendiquer leur droit seul, mais pour s’opposer aux politiques. L’un des rassemblements qui est à l’origine de l’adoption du 8 mars, est la revendication à Saint-Saint-Pétersbourg des ouvrières qui manifestent contre la vie chère et au retour de leurs maris partis faire la guerre. Nous sommes là un 23 février du calendrier julien qui est en vigueur à cette époque. Mais cette date correspond au 8 mars 1917. C’est le début de la révolution russe sous l’impulsion des femmes. Le résultat ne va pas se faire attendre, le 8 mars 1921 le Tsar décrète ce jour « La journée des droits des femmes ». Elle est chômée et en plus c’est un férié. Ce n’est qu’en 1977 que l’ONU adoptera le 8 mars comme la journée internationale de la femme. C’est ainsi que tous les états membres de cette institution ont été exhortés de faire de ce jour, un moment de plaidoyer sur la condition des droits de la femme. D’où cette éternelle question :  Célèbre t-on la journée internationale de la femme ou la journée des droits de la femme ? Le débat est ouvert.

Au Cameroun…

Si dans certains pays cette journée est célébrée de manière sobre, au Cameroun, les femmes en ont fait un jour de festivité. Une journée qui fait couler beaucoup d’encre et salive surtout lorsqu’on parle du pagne qui accompagne toujours cette journée. Mais revenons un peu en arrière pour comprendre même l’adoption de ce pagne. En effet, c’est à partir de 1986 qu’on a célébré pour la première fois, la journée internationale de la femme au Cameroun. Un fait né d’une volonté du gouvernement de montrer son implication dans le respect de la parité homme et femme au niveau de la société. Le port du pagne en lui-même débute dans la ville de Maroua, à l’initiative de la délégation provinciale des Affaires Sociales et de la Condition Féminine de l’Extrême Nord, qui a organisé le premier défilé des femmes sous la dénomination de « La Grande Marche de la Solidarité ». C’est ainsi que le succès de cette parade de femmes arborant un pagne pour la circonstance, s’est élargi au niveau national.

Alors trente trois ans de célébration de la journée internationale de la femme au Cameroun, quel regard pouvons-nous porter sur cette date ? Un regard mitigé. La célébration de la journée internationale de la femme au cours des précédentes éditions a donné lieu à tout genre de dérives. On ne compte plus les mariages qui sont partis en éclat, des femmes battues par leurs maris ou encore des femmes retrouvées au fond des caniveaux, la liste est vraiment longue. Le désir d’avoir juste un pagne a pris le pas sur la possibilité de revendiquer des droits dont-elles doivent bénéficier. Même-ci cela est fait, il n’y a qu’une minorité qui se bat pour le changement de la condition de la femme. On peut tout de même saluer des reformes qui ont été mis en place pour essayer de réduire la discrimination, de faire de l’égalité homme et femme une réalité. Mais il reste encore un problème d’éducation de masse, surtout au niveau de chaque culture. Qu’on le veuille ou non l’émancipation de la femme au Cameroun stagne en partie à cause des idées reçues vis-à-vis de la considération de la femme.




Dans certaines régions du pays les traditions sont plus avantageuses pour les hommes que pour les femmes, plus encore la perception qu’on a de la femme est la soumission, ce qui veut dire qu’elle n’a rien à dire. Selon l’Unicef plus de 30 % des jeunes filles au Cameroun vont en mariage très tôt, la plupart du temps avec des personnes âgées. Dans les foyers on ne compte plus le nombre de violences conjugales que subissent les femmes, pourtant les lois existent mais on peine à les appliquer sous prétexte qu’au regard de la société un homme peut battre sur sa femme. L’infidélité de l’homme est acceptable, mais celle de la femme non. Au niveau de l’éducation, très peu on la chance de poursuivre leur scolarité ou pas du tout. Dans les écoles de formations, elles ne sont pas nombreuses à faire certaines filières dites réservées aux hommes, pourtant lorsqu’on parle de développement, plus encore d’émergence elles sont interpellées. Mais dans ce contexte d’inégalité dans lequel les femmes évoluent au Cameroun il y a tout même certaines qui arrivent à s’imposer.

Aujourd’hui on perçoit une nette progression dans la représentativité de la femme au niveau des postes de décision. Tenez par exemple, au Cameroun on compte onze femmes ministres, loin des années 1970 où il n’y avait que Delphine Zanga Tsogo. Au sénat on a vingt femmes comme sénatrices. Ce n’est pas encore grand-chose, mais on sent une certaine volonté des autorités de briser le mythe de la femme au foyer. Même dans d’autres sphères les femmes réussissent tout de même à s’imposer, que ce soit dans la politique, le sport, entrepreneuriat, la santé, l’industrie ou l’agro-industrie, sont des pionnières dans ces univers gouvernés par les hommes.

Pour cette trente troisième édition de la journée internationale de la femme, elles sont une nouvelle fois  interpellées à participer au développement et celui-ci ne peut-être effectif si elles se réunissent pour revendiquer d’une seule voix leur statut au sein de la société. Pour les aider justement dans cette démarche, de nombreuses initiatives sont mises en place pour encadrer et accompagner celles qui se sont lancées dans entrepreneuriat, ou encore des conférences- débats pour les sensibiliser sur le rôle qu’elles doivent jouer dans la société. Malgré le chemin qu’il reste à faire en faveur des revendications des femmes, les beaux discours ne vont pas freiner  les ardeurs de celles qui ont déjà leur pagne prêt pour la parade et le reste, puisque le 8 mars ne va pas déroger à ce qui fait sa popularité au Cameroun.

Bonne fête à toutes les femmes du letch.

Auteur : Charly ngon

Molah ne te fie pas à mon name, je ne suis pas un mbenguiste, je suis du bled comme toi. Les hauts et les bas sont notre quotidien, donc ne fia pas c'est entre nous quoi ... comme au letch