Pourquoi la région du Sud Ouest Cameroun est surnommée « Silicon Mountain » ?

Pourquoi la région du Sud Ouest Cameroun est surnommée « Silicon Mountain » ?

Publié le 14 mars 2017, par Dickson
Buea

Buea

 

Buea est l’une des villes dites “anglophones” du Cameroun. Elle est située au pied du Mont Cameroun, un volcan en activité culminant à 4100 mètres d’altitude et qui se trouve être le plus haut du pays. la ville de Buea est classée parmi les villes au monde où il pleut le plus. En 2005, on y comptait pas moins de 131 325 habitants.

Malgré le climat humide, la ville de Buea possède de magnifiques lieux touristiques comme la place de l’indépendance plus connue sous le nom de bongo square, l’ancien Palais présidentiel, ou encore la belle route bitumée qui traverse les plantations de la Cameroon Development Corporation (CDC) reliant Buéa à Douala sur une distance de moins de 70 km. On peut y apprécier les immenses plantations de Thé Tole Tea. Et sans oublier bien sur le monument de la réunification.

La ville de Buea bien plus qu’une destination touristique est devenue une destination technologique. Elle accueille actuellement les plus jeunes start-ups TECH du Cameroun. Elle abrite une communauté de développeurs et designer s informatiques qui n’a cessé de croître au fil des 5 dernières années. Cette effervescence a aussi été rendu possible grâce à la présence des établissements comme l’université de BUEA, ou encore L’université Saint-Monica … Ce fort intérêt pour la technologie lui a valu le surnom de « Silicon Mountain ». Une référence à la Silicon Valley aux Etats unis et la touche locale représentée par le mot “Mountain” pour signifier le Mont Cameroun. Le terme a été utilisé pour la première fois publiquement par Rebecca Enonchong à la conférence Bar Camp Cameroon qui a eu lieu à Buea  en 2013.

La « Silicon Mountain » regorge d’importantes startups, des créateurs de logiciels, des développeurs d’applications internet et mobiles, des gens formés en marketing et à la vente d’innovations technologiques et la liste est loin d’être exhaustive. La plupart se retrouve à Activspaces. C’est un incubateur de start-ups, l’un des fleurons du High Tech à Buea. Les développeurs  travaillent sur beaucoup de produits différents mais ils partagent une chose. Ils font ce qu’on appelle la « glocalisation ». C’est un concept selon lequel on conçoit des produits répondant à un besoin local tout en visant une clientèle internationale. Les solutions développées peuvent clairement s’étendre bien au delà du marché camerounais. Pour vous citer quelques unes de ces solutions, nous avons par exemple :

Njorku qui est aujourd’hui l’un des plus grands moteurs de recherche d’emplois en Afrique. Avec plus de 50 000 visiteurs chaque semaine, le site est accessible en deux langues, le français et l’anglais, et permet de rechercher des emplois dans près d’une quinzaine de pays. Derrière cette plateforme se cache le brillant Churchill Mambe Nanje. A tout juste 30 ans, avec son équipe d’une dizaine de membres, il travaille 24 heures sur 24 pour faire évoluer son entreprise, qui vient tout juste de remporter le prix de l’entreprise la plus innovante du continent. Une reconnaissance qui lui permet de garder espoir.

Skademy formée à partir des mots « Skills » (compétences) et « Academy » (académie) est une plateforme e-learning africaine. Fondée par Otto Akama, la startup Skademy aide les gens à se former sur différentes technologies avec l’appui de tuteurs privés et des institutions reconnues en Afrique.

Viva, c’est une plateforme de divertissement pour les bus et les trains. Elle permet aux opérateurs des transports d’offrir à leurs clients des divertissements semblables à ceux disponibles en avion. C’est un réseau WIFI sécurisé et privé. Il existe également un réseau social pour les passagers. Le fondateur de la startup finaliste du Challenge Entrepreneuriat en 2016 est Mohamed Felata. Les utilisateurs accèdent au contenu VIVA avec leurs smartphones, tablettes ou dans des bus équipés d’écrans TV.  Le système met ainsi fin à la monotonie des voyages routiers.

Feem, c’est le meilleur moyen de transférer des fichiers (photos, vidéos, et documents) entre téléphones, tablettes et ordinateurs en local. Autrement dit sans Internet, sans câbles. Dans un contexte où l’on n’a pas toujours les accessoires de son téléphone pour transférer des fichiers vers son ordinateur, ou encore des téléphones dotés de Bluetooth, le Camerounais Fritz Ekwoge a développé Feem. Originaire de la région du Sud-ouest, Fritz Ekwoge, qui est le fondateur de l’entreprise Feeperfect, il a eu l’idée de concevoir cette solution à cause du faible pouvoir d’achat qui empêche encore les détenteurs de téléphones portables de contracter une connexion Internet mobile. En téléchargement gratuit sur le site www.tryfeem.com, l’application Feem est en téléchargement payant sur l’Appstore d’Apple.

La silicon Mountain, un vrai potentiel économique

En termes d’activité économique la « Silicon Mountain » représente des emplois directs et indirects pour plusieurs centaines de jeunes Camerounais. Une source de revenus pour des jeunes qui ont décidé de créer eux-mêmes leur emploi et d’en offrir à d’autres, sans compter sur l’État et surtout sans se plaindre. Ces jeunes diplômés développent chaque jour de nouvelles applications, des logiciels, investissent dans des start-up, des entreprises numériques qui ont des clients partout dans le monde, du Cameroun au Nigeria en passant par l’Europe et les Etats-Unis pour beaucoup.

Cependant, les jeunes startups à Buea rencontrent beaucoup de problèmes qui compliquent leur évolution : le manque de ligne de téléphone fixe, réseau incomplet, utilisateurs inexpérimentés. Les startups de la Silicon Mountain ont besoin d’investisseurs qui s’engagent dans la durée avec de l’expérience et un réseau de contact efficace. En plus de cela, depuis le 17 janvier, les régions du Nord-Ouest et du Sud-ouest du Cameroun sont privées d’Internet. L’incubateur ActivSpaces, dont les activités sont localisées à Buea, a été contraint de déplacer ses troupes dans la capitale économique du Cameroun, afin de ne pas stopper complètement leurs activités. L’investissement est très coûteux pour certains. Ils doivent se déplacer vers Douala, la capitale économique et ville la plus proche, pour  trouver  le réseau Internet.

Selon Julie Owono, la responsable de la branche Afrique de l’ONG Internet sans frontières (ISF), la coupure internet dans les deux régions anglophones a potentiellement fait perdre «  1,35 million de dollars à l’économie du Cameroun ». Plusieurs startups sont touchées Skademy, Agro-hub qui aident les agriculteurs à accéder aux marchés. Skylabase qui développe des logiciels informatiques abordables pour les entreprises.

Sur Twitter, une campagne #Bringbackourinternet (rendez-nous notre Internet) en faveur des régions  Nord-Ouest et Sud Ouest du Cameroun a été lancée. Des blogueurs, journalistes et « influenceurs » web ne décolèrent pas. L’une des portes étendards de ce mouvement d’indignation Rebecca Enonchong a écrit : « Le gouvernement camerounais a bloqué l’accès à Internet dans toutes les régions anglophones. Rejoignez-nous pour leur dire de #BringBackOurInternet », ce tweet a été  repris plus de 2 000 fois.

Cette censure du Net n’a pas laissé indifférent Edward Snowden, le célèbre informaticien américain exilé en Russie pour avoir rendu publics des documents de la NSA. Dans un tweet, repris et retweeté 4 500 fois, il affirme qu’« il s’agit de l’avenir de la répression. Si nous ne luttons pas là-bas [au Cameroun], cela va arriver ici »

 

La Silicon Mountain est donc vue comme cette zone qui occupe une place de choix dans le secteur de l’économie numérique au Cameroun en termes d’expérience, d’innovation, de nombre de start-up, et de qualité de produits et services offerts. Elle bénéficie d’un climat favorable pour la recherche mais c’est aussi une ville universitaire située à proximité de Douala, la capitale économique pourvoyeuse de techniciens et d’ingénieurs. Une chose est sûre, on n’a pas encore fini de parler de la Silicon Mountain …

Auteur : Dickson

Je fais partie de la Génération Androïde donc jamais sans mon phone. All les days, je jongle entre les fonctions de mélomane, d'internaute et de noctambule. En résumé, je suis un camerounais déjà avancé !