La Magie du Challenge Camerounais en Allemagne - Auletch

La Magie du Challenge Camerounais en Allemagne

Publié le 13 mai 2015, par Jean Ndi Ansa

challenge

A moins de vivre sur une autre planète, tout le monde a entendu parler de l’évènement de ce weekend, le Challenge Camerounais de Dortmund, en Allemagne.

Le challenge même c’est quoi ?

A l’origine, c’est un tournoi de football. Créé en 1992 à Bielefeld en Allemagne, son objectif était de renforcer  le sens de la communauté, en combattant la nostalgie et en échangeant les expériences accumulées entre les Camerounais résidant en Allemagne … Au fil du temps, cet événement a pris de l’ampleur et est devenu ce que nous connaissons aujourd’hui. Plus qu’une compétition sportive, c’est désormais the place to be pour tout Mbenguiste qui se respecte. Ça vient de tous les coins d’Europe et même d’ailleurs pour assister à cet événement.  Au programme, des tournois de football, handball, basket-ball, volleyball, athlétisme couronnée par une soirée de gala le dimanche où mes compatriotes sortent leur dernière valise.

Pourquoi le challenge fait autant de buzz ?

Certains diront qu’il n’y a rien de plus classique : Match de foot… BT… Soirée. Des loisirs dont nous profitons au quotidien dans nos lieux de vie respectifs. Mais cette histoire de challenge représente au Camerounais mbenguiste ce que la Mecque est à un musulman. Un mbenguiste doit, au cours de son séjour en Europe, avoir été vu au moins une fois au challenge.  Si tu as eu ne serait-ce qu’un visa de 6 mois, et qu’on ne t’a pas vu au challenge, c’est que tu n’as jamais été mbenguiste.

Voici comment s’organise un pèlerinage réussi en Allemagne:

Trois mois avant le Challenge, on prépare les armes. Ah oui ! Pour être vu, il ne faut rien négliger, quite à sacrifier trois mois de salaire dans la location de la Hummer. Le covoiturage est bien moins cher, mais mon frère, qui va se négliger? Pour les filles en particulier, le Challenge c’est le jour de son jour comme on dit chez nous. C’est ici qu’elle va trouver son bon gars, celui qui va changer sa vie. Pour ça, tous les moyens sont bons… Tissage ooh! Habillement ooh! Chaussure ooh! Je ne vous parle même pas du teint qu’elle prépare depuis des lustres. Eh oui,on ne va pas à la chasse au sanglier avec des morceaux de cailloux. Il faut être prête ma copine!

Deux semaines avant le Challenge, tu publies au moins un statut ou un tweet pour annoncer officiellement ta présence sur les lieux. Puis tu begin à chercher ceux qui ont fait comme toi  ie. poster un statut pour former ce qu’on appelle chez nous un charter d’attaque.

Le samedi du Challenge, se préparer à beaucoup marcher parce qu’il faut faire le tour de tous les stands au moins deux fois pour s’assurer que le maximum de personnes t’ait vu – sinon tu es venu pour rien dis donc ! Des fois, même le match de foot qui est la principale activité du samedi a moins de spectateurs que prévu. C’est aussi ce jour que tu vas croiser tes anciens amis et connaissances d’enfances, du quartier ou du lycée, tes anciens succès, les vilaines filles devenues belles, les minces qui ont grossi… bref ces personnes que tu avais totalement perdu de vue. Puis le soir, vient la BT. Je me demande toujours comment une boîte de nuit fait pour contenir autant de Camerounais. C’est la soirée des Camer forts et capables. Il faut être prêt pour avoir le courage d’aller en BT. Ne pars pas avoir soif là-bas pardon, prévois au moins l’argent de 5 consommations – trois pour toi et deux pour les deux seules nga qui accepteront de t’écouter cinq minutes. C’est là-bas que tu comprends que la souffrance que tu vis dans ton village perdu de Mbeng là, tu vis ça seul. Des gars t’alignent des bouteilles qu’ils ne boivent même pas. Tu vois des nga belles comme si elles se lavent avec le lait papa, jusqu’à tu commences même à faire les problèmes à ta propre nga pour rien. C’est ton ex avec son nouveau gars tu veux voir ? Ou ta camarade moche du lycée que tu avais barré qui est devenu nianga jusqu’à son gars te dépasse ? Je ne parle même pas de la prestation des très talentueux DJ camer de la diaspora. Vraiment ce soir-là, c’est le soir de toutes les émotions. Qualité de soirée qui te reste en mémoire au moins une semaine après la fin.

Le dimanche, journée plutôt calme. Les gars se posent pour boire une bière et manger le poisson braisé avec leurs camarades de longue date. Pour les chanceux, c’est le jour de concrétiser la vente de rêve de la mougou attrapée la veille. Vers 16 heures, les rues se vident. On se croirait dans un western à l’arrivé du chef bandit. En fait, les gars sont dans les essayages de combinaisons. Ils ne vont pas dans l’espace ; mieux, ils vont à la soirée de gala du challenge ! 30€ l’entrée sans conso ? Ce n’est pas grave. L’essentiel, c’est d’y être, cintré comme un pingouin! De prendre une photo devant le mur des sponsors et surtout, être tagué sur les réseaux sociaux aux côtés des plus grandes stars de Facebook. Qui ne veut pas se voir immortalisé pendant une salutation très amicale avec le célèbre El diablo Dj ou encore les patrons de groupes Facebook les plus connus ? Vraiment cette soirée là est encore mieux que le jour de la Pentecôte. Ce n’est pas le Saint Esprit qu’on reçoit, mais les points d’un an en une soirée. C’est aussi l’occasion de se pavaner avec sa dernière valise, tendu comme le koba kana*, et se sentir le plus beau/la plus belle de la soirée. Qui va se négliger ? Tous les atouts sont bons pour mettre les chances de son coté, car parait-il, beaucoup trouvent leur moitié ce soir-là. C’est un championnat high. Si tu ne rentres pas avec au minimum 5 nouveaux contacts Whatsapp, c’est que tu n’as rien fait.

– Lundi matin, pour bien finir les choses, un nouveau statut/tweet est posté, généralement en anglais ; du genre“It was a great night guys. On my way to Paris. Back to business. » Reste à savoir s’il/elle a rentabilisé son investissement. Anyway, l’année prochaine on remet ça, comme d’habitude.

 Légende:

Koba kana : poisson sec

Auteur : Jean Ndi Ansa

Je suis un perdu 3.0 qui touche à tout et parle de tout. Ma bouche va me tuer, que les muets ne restent pas mourir. On en parle @A_zTwT sans influence. #Peace